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27/11/09 - Récupération de créances et nouvelle loi sur la continuité des entreprises !
La procédure, qui est relativement simple à introduire, permet d’accorder un sursis en vue soit de faciliter la conclusion d’un accord amiable (articles 43 et suivants de la loi), soit d’obtenir l’accord collectif des créanciers sur un plan de réorganisation (articles 44 et suivants), soit de permettre le transfert, sous autorité de justice, à un ou plusieurs tiers, de tout ou partie de l’entreprise ou de ses activités (articles 59 et suivants).
Malheureusement, il est difficile de donner aux uns sans prendre aux autres ; les lignes qui suivent ont pour objet de faire comprendre aux créanciers, en des termes non exhaustifs, le sort que la loi leur réserve lorsque leurs débiteurs demandent la protection que le législateur leur a offerte.
1. Le dépôt de la requête et son examen
La procédure commence par le dépôt d’une requête, dont les créanciers ne sont avisés que si le débiteur le souhaite. Le Tribunal de commerce examine cette requête dans les dix jours de son dépôt. Après avoir entendu le débiteur et un juge consulaire, appelé « le juge délégué », le tribunal statue par un jugement dans les huit jours suivants.
Au premier stade de la procédure, le pouvoir d'appréciation du tribunal est réduit : la requête est toujours déclarée recevable si les pièces indispensables sont produites et s’il est démontré que la continuité de l'entreprise est menacée ; le plan proposé par le débiteur ne doit donc pas nécessairement être réaliste …
Le jugement fixe la durée du sursis (on parlait jadis d’un « sursis provisoire »), qui ne peut être supérieure à 6 mois, sous réserve d’une prorogation ultérieure, décidée, le cas échéant, sur requête du débiteur et sur rapport du juge délégué (le « sursis provisoire » ne peut être d’une durée totale supérieure à 12 mois à compter du jugement accordant le sursis majorés le cas échéant de 6 mois supplémentaires au maximum dans le cadre d’un transfert à dater de la décision autorisant celui-ci.
2. L’effet immédiat du dépôt de la requête : les actes d’exécution sont paralysés
Le dépôt de la requête a un effet immédiat : le débiteur ne peut plus être déclaré en faillite et aucune réalisation de biens meubles ou immeubles du débiteur ne peut plus intervenir à la suite d’une saisie : c’est l’effet « chapter 11 ». Entre le dépôt de la requête et le jugement accordant le sursis, les créanciers ne peuvent donc, au plus, que pratiquer des saisies conservatoires, qui nedonneront aucune priorité de paiement.
3. Dès l’octroi du sursis, les créances antérieures au jugement accordant le sursis sont en principe gelées
Les créances qui sont nées avant le jugement d'ouverture de la procédure de réorganisation judiciaire sont en principe gelées durant le sursis : le créancier ne peut pratiquer aucune saisie.
Pratiquement, cela signifie que le débiteur peut s’abstenir de payer les créances nées antérieurement au sursis ; il peut toutefois les payer s’il le souhaite … ou s’il a besoin de nouvelles fournitures de son créancier. Un éventuel paiement volontaire peut se faire sans respecter l’égalité des créanciers ou l’ordre des sûretés et privilèges et sans risque de voir le paiement déclaré inopposable en cas de faillite.
4. Le débiteur peut en outre mettre fin aux contrats en cours (sauf les contrats de travail) ; à défaut, les contrats en cours subsistent
A) Les principes
Même en l'absence de disposition contractuelle en ce sens, le débiteur peut décider de ne plus exécuter un contrat en cours pendant la durée du sursis, si cette non-exécution est nécessaire pour pouvoir proposer un plan de réorganisation aux créanciers ou rendre le transfert sous autorité judiciaire possible. Lorsque le débiteur décide de ne plus exécuter un contrat en cours, la créance de dommages est elle aussi gelée pendant la durée sur sursis.
En revanche, à défaut de rupture par le débiteur, les contrats en cours ne prennent pas fin d’office ; si le débiteur était en défaut avant le sursis, le créancier ne peut mettre fin au contrat si le débiteur régularise la situation dans les 15 jours suivant une mise en demeure.
Par ailleurs, « une créance issue de contrats en cours à prestations successives n'est pas soumise au sursis, en ce compris les intérêts, dans la mesure où elle se rapporte à des prestations effectuées après la déclaration d'ouverture de la procédure ».
B) Que doit faire pratiquement le débiteur ?
Pour les contrats en cours (relatifs par exemple aux crédits, à la fourniture d’énergie ou aux assurances), le débiteur doit donc observer le régime suivant :
- il doit toujours payer les sommes dues en vertu de prestations postérieures à la déclaration d’ouverture de la procédure ;
- en pratique, il devra bien payer les sommes dues pour la période antérieure si le créancier menace de mettre fin au contrat : dans ce cas, le paiement devra s’effectuer dans les 15 jours de la mise en demeure (qui devra par hypothèse être postérieure au jugement accordant le sursis) ;
- à défaut de régularisation dans les 15 jours de la mise en demeure, le créancier a toujours le droit de rompre le contrat (ainsi, le banquier a le droit de dénoncer les crédits) ;
- le débiteur devra également se résoudre à payer les sommes dues pour la période antérieure si le créancier se prévaut du droit de rétention ou de l’exception d’inexécution dans des conditions qui empêchent l’entreprise de fonctionner.
5. Et quid des clauses pénales et autres majorations ?
Les clauses pénales, en ce compris les clauses de majoration, restent sans effet au cours de la période de sursis et jusqu'à l'exécution intégrale du plan de réorganisation en ce qui concerne les créanciers repris dans le plan. Le créancier peut cependant inclure dans sa créance le dommage réel subi par suite du non-respect d’un engagement, mais cela entraîne la renonciation définitive à l'application de la clause pénale.
6. Comment les créanciers peuvent-ils faire valoir leurs droits ?
Le débiteur qui bénéficie d’un sursis doit avertir tous ses créanciers dans les 14 jours du prononcé du jugement. Dès réception de cet avertissement, les créanciers peuvent contester les montants repris par le débiteur et le cas échéant porter leur contestation devant le tribunal (art. 46). Les créanciers peuvent également déclarer une créance par le dépôt, au dossier de la réorganisation judiciaire qui est tenu au greffe, d’un titre constatant cette créance. Ce dépôt suffit pour interrompre la prescription, et cette formalité vaut également mise en demeure (art. 20 al. 3).
Tout créancier peut demander de mettre fin à la procédure si le débiteur n’est manifestement plus en mesure d’assurer la continuité de son entreprise ; cette révocation peut survenir entre le 30ème jour qui suit le dépôt de la requête et le dépôt du plan de réorganisation. Les créanciers ont donc intérêt, chaque fois qu’ils sont confrontés à une procédure de réorganisation, à savoir à quel stade de la procédure le débiteur se trouve.
Pour déterminer les dates importantes de la procédure, les créanciers reconstitueront l’échéancier du débiteur, à partir des informations qu’ils recueilleront dans la lettre d’avertissement que le débiteur doit leur adresser, en principe dans les 14 jours du jugement, et dans l’extrait publié aux annexes du Moniteur belge, en principe dans les 5 jours du jugement.
L’exemple suivant, qui correspond au cas d’un sursis demandé pour obtenir l’accord collectif des créanciers sur un plan de réorganisation, montre comment préciser, à titre indicatif, les « dates à retenir » :
- date du dépôt de la requête : 25 septembre 2009
- audience devant le tribunal de commerce : 7 octobre 2009
- date du prononcé du jugement : 16 octobre 2009
- date de la publication d’un extrait du jugement au Moniteur belge : 30 octobre 2009
- avertissement des créanciers par le débiteur : 10 novembre 2009
- date de demande d’un jugement fixant l’audience à laquelle il sera procédé
au vote sur le plan : 15 février 2010
- date d’une demande éventuelle de prorogation du sursis : 15 février 2010
- date de dépôt d’un plan de réorganisation : 28 février 2010
- date de convocation des créanciers (les créanciers doivent être convoqués
pour voter sur le plan de redressement, pour une première audience, dite de vote ;
une deuxième audience au cours de laquelle il sera statué (homologation)
sera le cas échéant fixée dans les jours suivants) et notification avertissant
les créanciers de la possibilité de consulter le plan au greffe : 10 mars 2010
- date de l’audience de vote (14 jours avant l’échéance du sursis -
le vote ne peut lui-même avoir lieu que 14 jours au moins après la notification) : 31 mars 2010
- fin de sursis provisoire ou homologation du plan : 15 avril 2010
- le cas échéant, fin du sursis définitif (sauf prorogation de 12 mois au plus) :
25 septembre 2011
- exécution du plan (maximum 5 ans à dater de l’homologation) : 15 avril 2015
Ce schéma est volontairement simplifié, et il ne rend pas compte de divers incidents susceptibles de jalonner la procédure : une réorganisation judiciaire ne s’improvise pas, et elle commande une attitude vigilante de la part des créanciers.
Source :
Michel FORGES
Avocat associé - spécialiste en droit des saisies et des sûretés
Chargé d’enseignement à l’Université de Mons
Juge suppléant au Tribunal de commerce de Bruxelles
Médiateur civil et commercial agréé
FABER INTER - LAW FIRM
Drève des Renards 4 & 6 - 1180 Bruxelles
tél. (00.32).2.639.63.69
m.forges@faberinter.be
www.faberinter.be
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